Rochers
de
Saint-Pardoux
Bugeat
Parfois, on dit qu’aller faire la bujade au lavoir était une corvée exténuante. Parfois, on dit que c’était un moment de sociabilité joyeuse. Parfois, on dit que les lavoirs étaient de lieux interdits aux hommes. Parfois, on dit que c’étaient des lieux propices aux rendez-vous, à la séduction.
Tout est vrai...
Probablement...
Au-delà des contradictions apparentes.
Les cartes postales anciennes du lavoir des rochers de Saint-Pardoux montrent que ça dépend du point de vue et de notre capacité à zoomer dans l’image...
Cette première photo montre une scène plutôt austère. Les deux femmes occupées à laver ont la tête baissée, on ne voit pas leurs visages.
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La ligne de l’horizon, la ligne du chemin et la ligne du ruisseau forment des angles aigus.
La photographie suivante montre le même lieu, mais avec une perspective opposée. Vu d’ici, le cours de l’eau fait de jolis méandres, et même les arbres semblent joyeux, avec leurs troncs courbés.
Si on zoome suffisamment, on distingue quinze personnes.
Le plus en amont, sur la rive de droite, six femmes sont occupées à laver, et sur l’autre rive une femme se tient debout.
Plus en aval, sur la partie droite de la photo, six regards sont tournés vers l’objectif La jeune femme prenant la pose, accoudée au muret, devant le tronc incliné ; les deux femmes les mains dans l’eau qui relèvent la tête ; l’enfant tenant un bâton ; les deux enfants assis.
Enfin, tout en bas à droite, la femme assise sur la brouette, regardant dans ses bras un paquet blanc… qui doit être un bébé emmailloté, la quinzième personne ! En effet, ce paquet blanc est flou (le bébé bouge, ou la femme qui le tient le berce), et puis il y a un landau au premier plan, tellement en déséquilibre que ce n’est pas possible qu’on ait laissé le bébé dedans…
Les arbres n’ont pas de feuilles, les ombres sont nettes et allongées : c’est probablement un beau matin de printemps.
Même endroit, plusieurs cycles de saisons ont passé : le hêtre incliné a élargi sont tronc, et mis ses feuilles.
À gauche du ruisseau, deux dames âgées, l’une assise sur la brouette, et une jeune femme aux cheveux clairs penchée vers l’eau.
De l’autre côté, sept jeunes personnes.
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En amont, deux femmes redressées sourient aux dames âgées. Trois femmes sont courbées vers l’eau. Et, entre elles, deux personnes sont connectées du regard : la jeune femme au visage expressif, tout en essorant son linge, semble parler avec celui qui a les cheveux courts (de dos) et qui ne participe pas à la lessive : un jeune garçon, un jeune homme ?
Zoomons, là encore, sur les personnages...
Cinq, jeunes et moins jeunes, en robes et cheveux longs, sont occupées à faire la lessive.
Le sixième personnage porte pantalon, canotier, moustaches, et il est tout à fait oisif… un homme !
Il est encore là… Pour cette dernière photo, il est descendu jusqu’à la planche (pont). Il se fait photographier maintenant en compagnie d’une femme et d’une jeune fille, très élégantes, qui de toute évidence ne sont pas là pour faire la lessive.
Grâce à Jean-Yves Urbain, maire de Bugeat et cartophile, on résout le mystère de cet homme à moustaches : il s’agit du photographe lui-même, qui profite d’être venu dans cet endroit charmant pour faire une photo de famille.
En attendant, les laveuses, en haut, ont terminé la lessive : les draps sont écartés sur l’herbe pour sécher au soleil.